Les étudiant·es ne sont pas les seul·es à être impacté·es par les politiques de casse du service public de l’enseignement supérieur et de la recherche. Les enseignant·es et personnels de l’université sont aussi durement touché·es par les coupes dans le budget de l’ESR, et voient leurs conditions de travail se dégrader constamment, les doctorant·es et précaires de l’ESR au premier plan. Le constat est alarmant, le taux d’encadrement des étudiant·es ne cesse de se détériorer avec aujourd’hui 3,2 personnels titulaires en moyenne pour encadrer 100 étudiant·es.
Les doctorant·es sont infantilisé·es et traité·es comme des sous-personnels de l’université en raison de la duplicité de leur statut, mi-étudiant·e mi-travailleur·euse, aux yeux des directions d’établissement.
Ces chargé·es de travaux dirigés sont souvent embauché·es au titre de vacations. La vacation à son origine est un dispositif qui permet aux établissements de faire intervenir contre rémunération pour des besoins ponctuels des personnes extérieures à un établissement. La pérennisation de ce type de dispositif par les universités et l’explosion de son recours précarise énormément de chercheur·ses qui sont donc rémunéré·es au nombre d’heures effectuées et souvent plusieurs mois (voire plusieurs années) après la constatation du service fait. Le recours à la vacation constitue une prestation de service et non un emploi stricto sensu et empêche l’accès à l’ensemble de la protection liée à ce statut. La mise en protection de ces personnels pourtant essentiels à nos établissements est remise en cause.
Le caractère indispensable des personnels vacataires est notamment attesté par la forte augmentation du recours à la vacation dans nos universités, entre 2013 et 2021 puisque l’on constate une augmentation de 30% du nombre de vacataires qui s’opère pour arriver jusqu’à 167 000 personnels qui représentent donc ⅔ des personnels de l’enseignement supérieur. Alors que dans le même temps, ce sont également les heures de travaux dirigés à assurer qui connaissent une inflation galopante, en effet si 2,9 millions d’heure de TD étaient à assurer annuellement en 2013 c’est aujourd’hui 5,6 millions d’heures qui doivent être effectuées pour garantir le fonctionnement de nos universités. Certains collectifs de chercheur·ses ont pu s’illustrer par leur lutte sans compromis contre le recours à la vacation et les retards de paiement dont celle-ci fait l’objet. De fait, c’est par la coordination de l’action de terrain et l’action judiciaire que le collectif doctorant·es de la CGT Ferc-Sup a pu obtenir le paiement, de la part de nombreuses universités, des heures de vacations non-payées.
Cette augmentation effrénée du nombre de vacataires dans nos universités se conjugue avec une baisse du nombre de titulaires. Les universités se tournent en effet vers l’emploi d’un public précaire et plus dépendant des établissements, parfois même forcé d’accepter ce cadre de travail indigne pour arriver au terme de la thèse – les contrats doctoraux étant souvent inadaptés à la durée des travaux de recherche. Sans compter qu’un tel recours à la vacation constitue une violation coordonnée et structurelle du cadre législatif existant.
La duplicité du statut des doctorant·es impose donc à celleux-ci le paiement des frais d’inscription les plus élevés de tout l’enseignement supérieur, soit 391€ sans compter la CVEC (103€) à laquelle iels sont également astreint·es. Cette soumission au paiement de ces frais obligatoires par des travailleur·ses qui sont aussi essentiels au fonctionnement de l’université est humiliante et infantilisante. Les élu·es de l’Union Étudiante se sont toujours battu·es pour faire cesser cette humiliation en tentant de généraliser le principe de l’exonération des frais d’inscription pour les doctorant·es.
À l’université Rennes 1, les élu·es de l’Union Pirate ont permis la suppression des frais d’inscription pour les doctorant·es en mettant en place une exonération automatique du paiement de ces frais. Cette victoire repose avant tout sur une coordination parfaite entre représentant·es des étudiant·es et des chercheur·ses pour obtenir la fin de l’infantilisation des personnels essentiels de l’établissement.
D’autant que le statut précaire des chercheur·ses est également un facteur qui favorise la commission de violence de toute sorte dans le cadre de la relation encadrant·e/encadré·e, notamment les violences à caractère sexistes ou sexuelles.
En dehors des personnels qui assurent directement les enseignements il faut également citer les situations vécues par les personnels de bibliothèques, ingénieurs, administratifs, techniques et sociaux et de santé (BIATSS) dont le statut spécifique au sein de la fonction publique les astreint à un régime salarial inférieur aux autres secteurs de la fonction publique. Ce régime salarial ad hoc s’accompagne également d’un mouvement global d’individualisation des tâches et de mise en tension des missions avec des nouvelles tâches de plus en plus nombreuses à effectuer sans revalorisation salariale aucune. La menace qui pèse sur les BIATSS est également la menace de la contractualisation puisqu’aujourd’hui près de 90 000 personnels BIATSS sont à répertorier dont 33,7% sont des contractuels soit 30 330 agent·es. La baisse des budgets alloués à l’Université a inévitablement des conséquences sur les conditions de travail, a commencé par des services et/ou missions sous-dotés. C’est le résultat de campagnes d’emplois répondant à des logiques gestionnaires. Cette casse des budgets met aussi plus directement en péril les personnels sur la capacité des universités à les payer, comme cela a pu être le cas dans certaines universités cette année.
Dès le début de la mobilisation des agent·es d’entretien de Sciences Po Paris, le 6 mars 2025, nous les avons accompagné·es dans leur lutte contre la politique de sous-traitance défaillante de Sciences Po. Cela fait depuis 2 ans qu’iels sont exploité·es par Atalian et Sciences Po, puisqu’on ne cesse de leur retirer des heures de travail (700h par mois), tout en leur demandant d’effectuer les mêmes tâches de nettoyage et d’entretien qu’avant.
Face à cette surcharge de travail inadmissible et hypocrite, nous nous sommes mobilisé·es tous les matins pour participer au piquet de grève organisé par les agent·es et leur apporter notre soutien. Nous avons évidemment communiqué sur les mensonges de l’administration qui n’a fait que diaboliser les grévistes, et qui a d’ailleurs aussi lâchement fermé Sciences Po Paris pendant une semaine entière pour invisibiliser la grève et la lutte des agent·es d’entretien, alors qu’iels ne demandaient que des conditions de travail humaines et décentes.
Parmis les personnels invisibilisé·es au sein de nos campus, il faut nécessairement citer le cas des agent·es d’entretien dont les conditions de travail détériorées riment souvent avec sous-traitance en cascade et travail sous-payés et peu valorisant. Par exemple, les agent·es d’entretien de Sciences Po Paris ont récemment mené une lutte contre la dégradation de leurs conditions de travail, cette mobilisation salutaire pour la visibilisation de ces personnels invisibles a notamment été accompagnée par les syndicalistes de l’Union Étudiante. A Limoges, c’est aux côtés des personnels de bibliothèque que nous nous sommes particulièrement mobilisé·es pour relayer leur lutte et participer au rapport de force pour obtenir victoire.